Le Crépuscule du Lion

Livre Un - Le Mondialis Amour

 
Page 11 
"...À l’origine existait le Monde.

Globe plantureux démuni de complexes, il passait ses jours et ses nuits à contempler sa magnifique majuscule et, pour s’admirer au mieux, ne cessait de tourner sur lui-même. Cependant, alors que le miroir de l’Univers lui renvoyait un minois agréable, clair et lumineux, ce prétentieux prenait ombrage de sa propre impuissance, celle de ne pas apercevoir, dans un même temps et par un processus concomitant, sa face postérieure généralement couverte de ténèbres ingrates, obscures et parfois lugubres.

Durant plusieurs siècles, le Monde s’évertua à poursuivre ce rêve narcissique et lança maints chantiers de grande évolution avec une intense activité. Mais il eut beau peaufiner son axe de rotation et modifier sans relâche reliefs et proportions, les lois de la physique combinées à celles des figures géométriques demeurèrent intransigeantes ! Le globe dut se contenter de n’être qu’une Terre dont la rotondité démontrée ne fut pas suffisante pour combler ses vastes ambitions. Et, de théories appliquées en spéculations accélérées, son idéal d’unité finit par inventer une parade digne de l’envergure de son dessein : ce fut l’ère fameuse de la mondialisation…"

Page 105 - 106
"...Arnaud s’emballa dans une euphorie soudaine :
— Je galvaniserai les troupes, je convaincrai les timorés, je redonnerai à la vie l’énergie pragmatique d’une nouvelle évolution ! Le travail tel que nous l’avons conçu pour redresser l’héritage d’une planète bancale nous asservit jusqu’au point où l’épuisement empêche toute prise de recul sur notre situation… Alors que le Monde se targue d’avoir converti toutes les nations en fédérations démocratiques, la sphère hermétique de la rentabilité ne s’en trouve que plus despotique ! Et tout cela, au nom d’un principe de survie ! Nous sommes devenus de vulgaires fourmis usinant pour un intérêt collectif se résumant à des quotients, des ratios, des proportions pour le calcul du salaire, de la ration alimentaire, du temps de repos. Y’a-t-il un coefficient affecté aux relations humaines ? Même pas ! Trop insignifiantes ! Elles ne méritent pas l’attention de la plus basique des arithmétiques ! Est-ce là l’aboutissement de l’évolution de l’espèce ? Je préfère espérer une issue, quitte à créer la faille dans le système afin que s’y engouffre une destinée bien plus grandiose !
— Je suppose que tu te prépares à cette révolution depuis plusieurs mois…
Arnaud lui jeta un regard noir :
— Ce n’est pas une révolution, mais une rénovation ! Je n’invente rien ! Car tout a déjà été pensé par d’éminents aïeux ! La seule différence, celle qui m’appartiendra, sera d’avoir osé, en tant que politicien, me présenter comme le premier maître d’œuvre du Troisième Millénaire, avec pour programme un difficile chantier humaniste : la paix sur la Terre, pour tous et en même temps !
Paul sourit :
— Je sens poindre tes talents dans l’art de la rhétorique…
Arnaud se redressa, inspira longuement puis déclama :
— Amour… Qui donc es-tu ? Un grain de sable qui affole le gigantesque rouage mondial ou une minuscule pierre précieuse à retrouver dans l’immense désert que sont devenues les relations humaines ? Pourquoi te craint-on au point de vouloir châtier celui qui a seulement osé parler de toi ? Et si, grâce à ce nouveau souffle, nous en profitions pour prendre ensemble une dimension planétaire ?
— Est-ce l’introduction de ton discours d’investiture prévu pour le poste de Gouverneur ?
— Tout à fait !
— Es-tu sérieux ?
— L’utopie est-elle, au pis aller, un crime ou, tout au plus, un mot encore interdit ?..."
 
Page 204 - 205
"...Arnaud mesura soudain la gravité de l’instant à cause de l’attitude hautaine de la princesse. Tous les discours ampoulés d’Alkur valsèrent dans sa tête, depuis le procès jusqu’au matin même, flirtant avec les images qu’évoquaient les diverses définitions des mots tels que poète, philosophe et chevalier. Il murmura avec autant d’âpreté que de réalisme :
— Ainsi donc, me jettes-tu au sérail avec pour seul viatique une vaillante lutte contre moi-même ! Quel doux euphémisme se cache sur la couche de l’Acacie si, pour connaître telle volupté, mon bras doit saigner toutes jouissances terrestres afin de rendre à l’âme de divines pensées, celles qui lui sont vitales pour exulter ? N’est-ce pas, en d’autres termes, une requête pour une chasteté légendaire condamnant l’ancien tyran à une abstinence proportionnelle à ses frasques passées ? Ah ! Je vaincrai seul contre mes propres imperfections, luttant contre maints sicaires dépêchés par mes ignobles défauts ! Qu’il en soit ainsi ! Mais que nul bretteur n’entrave mon chemin ! Je triompherai de mes chaînes comme de mes libertés ! Et que mon air faraud n’outrage point les faibles : je serai leur défenseur quand, jetant l’anathème sur cette mondialisation qui les anéantit, il me faudra porter devant l’hémicycle du Tribunal Planétaire de nouvelles dispositions infrangibles, ne faisant preuve d’aucune mansuétude envers quiconque ! Car on me réputera bientôt pour un humaniste hors du commun, ayant brillamment réussi à convertir ses grands défauts en utiles qualités !..."
 
Le crepuscule du lion tbe
 
Je commande de livre en version papier
Je commande ce livre en version e-book
 

le-papillon-sur-la-rose.jpg

Amis des Livres,

Auteur indépendant se définissant comme Artisan littéraire, Peintre de l'écriture et Orfèvre du vocabulaire,

je vous présente Instants de Mots, atelier et échoppe consacrés aux travaux d'une plume où, entre pleins et déliés, chaque lettre se veut graine, couleur, émotion, effluve...

Le portillon n'a pas de clé et le temps qui passe est à la portée de l'instant précieux qui le cueille...

Entrez et soyez les bienvenus !