Le Crépuscule du Lion II

Livre Deux - Oxyrius

Page 56 - 57

"...Le Professeur dut reconnaitre :

— L’astéroïde entrera-t-il dans notre atmosphère ? Rien n’est sûr… Mais ce raisonnement vaut pour son contraire ! Qui peut garantir que ce capricieux caillou ne changera pas à nouveau de trajectoire ?

Une femme qui paraissait concentrée sur le sujet remarqua :

— Se peut-il qu’il dévie dans une direction qui l’éloignerait définitivement de la Terre ou est-ce déjà une théorie improbable selon nos informations actuelles ?

Le Professeur sourit comme si l’hypothèse était une farce :

— Merci, chère Madame, car votre question nous reconduit à l’essentiel : le risque majeur dont je vous parlais tout à l’heure…

Il jeta un regard noir vers Thieryck Ellison qui fit mine de consulter les messages sur son visiophone. Regulus reprit :

— Car le véritable danger, Mesdames et Messieurs, ce n’est pas que cette boule en folie hésite à venir caresser la croûte terrestre ou, au pire, la heurter ! Non, non, non ! L’unique catastrophe aux conséquences sans doute irrémédiables, chers amis et citoyens du Monde, ce serait que la météorite soit attirée par notre bon vieux globe !

Surpris, Ellison leva brusquement son visage :

— D’un point de vue scientifique, quelle est la différence entre être attiré et heurter ?

Regulus Donatello s’agita comme s’il endossait à nouveau le costume d’un enseignant universitaire et tourna plusieurs fois autour de la table, les pans de la blouse grise frôlant le dos des politiciens. Et soudain, de sa baguette, il fit un aller-retour fulgurant entre l’identification de l’astéroïde et celle de la planète pour pointer le Soleil en criant avec le ton de l’évidence :

— L’énergie, Chancelier ! L’énergie !

Le Gouverneur regarda ses collaborateurs, se demandant si Regulus Donatello n’était pas devenu un brin toqué depuis son incarcération. Même Thieryck Ellison paraissait désappointé. Seule la femme intéressée par le raisonnement du Professeur ébaucha une première explication :

— Voulez-vous dire qu’il est possible que la météorite soit attirée par la Terre à cause d’une énergie…

Le maître des astres sourit et l’encouragea à poursuivre en acquiesçant de la tête. Ils entendirent tous avec effroi un murmure plutôt tragique :

— … à cause d’une énergie similaire à la sienne ?

Comme dans ses anciennes habitudes universitaires, lorsqu’un brillant élève devançait les solutions du cours, Regulus lui tendit la main pour la féliciter. La femme serra les doigts rugueux sans vraiment réaliser qu’elle venait d’énoncer une évidence sur laquelle avaient buté d’éminents physiciens.

— Bravo, chère Madame ! Tous mes compliments !..."

Page 184 - 185

"...La nuit avait lentement enveloppé les jardins superposés. De la douce pénombre montaient les sueurs de la terre humide et celles des pistils gorgés de soleil, des aromates écrasés, des pierres chaudes et des poudres safranées. Les grillons étaient si bien logés qu’ils rendaient hommage à leur havre en s’échangeant des variantes de symphonies, créant ainsi un chapelet musical ininterrompu. Par moments, un cri d’animal rappelait que la nuit, l’oasis était aussi l’éden d’une faune qui, à l’égale des deux oiseaux de la tonnelle, vivait librement. Alors, entre les bruissements de la petite jungle, quelques effluves âcres évoquaient un plumage chamarré, un pelage ondoyant ou une haleine féline.

Arnaud crut que le président ne tarderait pas à se retirer pour aller dormir dans son palais. Mais le jeune domestique revint pour servir des tisanes digestives et allumer quelques serpentins de couleurs qui eurent la double efficacité d’éclairer la treille de tons doux et de chasser les insectes indésirables. Il put voir les deux oiseaux, serrés l’un contre l’autre, leurs têtes réfugiées sous leurs ailes respectives. Tout en savourant quelques gâteaux au miel, ses gourmandises préférées, Tayeb reprit avec un œil alerte :

— Même si nous butons à chaque sujet de discussion, souviens-toi, Arnaud, ce qui est important, c’est ce que tu n’as pas encore fait ! Croire en la Constitution Planétaire est ton seul gage de survie ! Que tu la nommes Mondialisation Humaniste Rénovée ou Mondialis Amour, ce qui compte avant tout aujourd’hui, c’est d’unir les peuples sous la conscience que la Terre ne pourra se transmettre à la postérité que si elle est unifiée !..."

 

Page 235 - 236

"...Songeur, l’architecte regarda le jeune homme s’éloigner dans sa démarche souple et légère. Le vent prenait de l’ampleur et emmêlait ses cheveux bouclés devant ses yeux. Il râla sous l’œil réprobateur de l’Homme-Assis qui avait pris possession de son poste. Pourtant l’Acacien crut déceler un sourire bref sur le faciès d’ordinaire impassible : le gardien de la tranquillité sociale du chantier confirmait-il les soupçons d’Akner et offrait-il une quelconque sympathie de possible allié ?

L’esprit de plus en plus agité par de nombreuses questions, Khouros songea à Arnaud Pontillac. Plus que tout autre participant à la construction de la Citadelle de Prottis, il souhaita que l’homme sortît victorieux de son procès. Mais pas à n’importe quel prix, et surtout pas, en jetant dans la balance de la Justice la trahison de l’Acacie.

La prière que l’architecte insuffla dans chacun de ses gestes crypta ce codex à travers le chant de ses outils afin que les ondes de l’Univers en fassent le meilleur usage..."

 

Page 258

"...Alkur resserra l’étau et marcha plus vite. Bientôt la clameur fut telle que tout échange de paroles fut impossible. Arnaud ne voyait pas les gens qui s’agitaient derrière les palissades maintenues par les cordons d’agents de la sécurité. Mais il percevait dans leurs voix un si grand espoir, une si belle envie de renaître qu’il se sentit devenir le dépositaire d’une précieuse énergie retrouvée. Lorsqu’il pénétra dans le Tribunal, trois gueules de lions s’animèrent pour traduire dans sa poitrine l’appel du Peuple de la Terre pour l’avenir de l’amour. Il eut l’intime conviction qu’au sein même de l’Univers, selon une fusion inédite, les planètes s’alignaient entre elles pour épouser à la vitesse de la lumière les propriétés d’une ligne droite sur laquelle surfaient les caractéristiques de leurs cercles parfaits, créant ainsi l’inconcevable rayonnement d’une paix régnant sur le Monde..."

 

Page 288

"...Tout le corps de Yoïs se contracta. Pendant quelques minutes, elle sentit les muscles de ses épaules tressaillir. Puis Saphira défit lentement son étreinte. Doutait-il de l’attitude à prendre ou pensait-il déjà à cette autre femme qui épouserait sa chair sans la moindre retenue ? Soudain, il quitta la pièce sans se retourner et ferma la porte avec une remarquable délicatesse. Les Yoïstes étaient des gens respectueux des désirs de chacun.

Nourrie de la succulence et du rayonnement intérieur de Yoïs, Saphira se recoucha. S’abandonnant contre de confortables coussins, le visage à la blancheur diaphane pleura silencieusement des larmes bleues..."

 

Page 317

 

"...Les deux hommes se levèrent ensemble et se mirent en face du soleil, le buste légèrement incliné vers l’avant et les mains jointes devant leur poitrine émue. Derrière leurs fronts inondés d’or, des prairies garnies de touches fleuries se voyaient traverser par des gazelles graciles que des miroirs dupliquaient sur des montagnes blanches. Des oiseaux aux plumages vifs et joyeux striaient le ciel pur et l’air embaumait du parfum suave des pétales d’acacias. En Acacie, la Vie se renouvelait à l’infini, sans les langueurs mélancoliques des automnes pluvieux ni les interminables températures négatives des hivers polaires.

« Ce soir, peut-être, le Monde connaîtra un éden identique… », songea Alkur. Puis il étreignit les épaules d’Akner comme un père l’eût fait à son fils..."

 

Photo couverture livre tbe

 

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